« Intrigués plus qu’hostiles, les villageois observaient l’étrange tableau que nous formions. Cette femme en grande robe de noces, sans homme, tirant une charrette pleine de fleurs et d’enfants. Ce garçon encadré par ses boucles rouges. Et cette petite fille qui semblait luire, oui, luire, au beau milieu de ces fleurs ! »
Fable ou conte ?
Ce premier roman de Carole Martinez – elle est l’auteur depuis de plusieurs autres parmi lesquels Du domaine des murmures, prix Goncourt des lycéens, qui m’a laissé plus que dubitative – est à la croisée de la magie, de la superstition et d’une religiosité. Une marque de fabrique de l’auteur.
Au sud de l’Espagne, Frasquita, jeune fille, hérite, au moment « du premier sang », d’un don fabuleux qui va faire d’elle une couturière à part, magnifiant le moindre bout de chiffon en œuvre d’art. Si elle sait coudre les étoffes entre elles, elle répare aussi d’un coup d’aiguille les cœurs, les blessures…
« Quand sa belle-fille brodait, la Carasco se ramassait sur elle-même afin que l’ombre de la main, afin que l’ombre de l’aiguille ne vint jamais se viser contre son ombre desséchée.
Armée d’une aiguille, ma mère plia la place forte. (…) La Carasco s’adoucissait de jour en jour au contact de la beauté. »
Dans sa robe de mariée
Soledad, la dernière fille de Frasquita, l’enfant de la route, raconte l’épopée d’une mère qui ne lui accordera jamais aucune attention, aucun baiser… Mariée, mère de famille, la femme aux doigts d’or, jouée et perdue par José son mari, cherchera alors une autre destinée.

D’un point de vue du style, le roman est remarquablement écrit. Il tient aussi toutes ses promesses narratives : les coups de théâtre sont absolument inimaginables et très bien vus. Le texte pour poétique qu’il soit porte une histoire cruelle où la folie rivalise souvent avec la raison, faite d’amour, de trahisons, d’espoir déçus, de révolution avortée… Je vais mettre du temps à me remettre du destin de Pedro, troisième enfant de la couturière, génial dessinateur, en quête d’un amour paternel qui, on le devine bien, ne viendra jamais.
« Seuls me surprennent ces moments héroïques où, dans un monde chaotique, un être par nature aussi imparfait que l’homme se laisse gagner par la pitié et par l’amour. »
Un roman qui ne laisse pas indifférent, à lire en se laissant entraîner dans une aventure fantastique pourtant très réaliste, qui parle d’abord de la profondeur du mystère de la vie, brodée au rouge passion de l’Espagne, de toute la palette des émotions humaines. A emporter dans votre valise cet été ?
Fiche technique du livre
Auteur : Carole Martinez
Editeur : Folio, février 2007
Nb de pages : 444 pages
Genre : Fable
Photo tête d’article : Pezibear de Pixabay
merci pour les conseils
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Très bonne idée Marie-Anne. Livre à emporter dans la valise avant de filer en Espagne…
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