Livre/Miroir de nos peines, Pierre Lemaitre

Vous l’attendiez ? Moi aussi.

Après l’histoire d’Edouard Péricourt dans Au revoir là-haut, prix Goncourt 2013, celle de sa sœur Madeleine dont la vengeance n’en finissait pas de flamboyer dans Couleurs de l’incendie, Pierre Lemaitre achève sa trilogie de l’entre deux guerres. Louise était enfant quand, dans le premier opus, Edouard Péricourt et Albert Maillard, deux abimés de la première guerre mondiale, s’installent dans « le petit bâtiment qui avait autrefois servi d’entrepôt à son père » attenant à la maison où elle habite avec sa mère. On la retrouve dans Miroir de nos peines, en avril 1940, juste avant la débâcle. Louise est devenue une très belle femme, ce qu’elle ignore. Elle vit seule, Armand son fiancé n’ayant pas survécu à leur stérilité, ce qui n’a pas arrangé son caractère : « Dans son dos, on l’appelait ‘la Joconde’, et ça n’était pas aimable ». Elle partage son temps entre le restaurant de monsieur Jules où elle donne un coup de main comme serveuse et son métier d’institutrice. Jusqu’au jour où…

A travers ces pages, l’auteur nous entraine à la suite de ses personnages dans les évènements de la drôle de guerre à la panique de l’exode, quand des hordes de civils fuyant l’invasion allemande se sont jetés sur les routes dans un désordre immense, un indescriptible chaos.

« La voiture cahotait lentement dans le flot des fuyards qui était à l’image de ce pays déchiré, abandonné. C’était partout des visages et des visages. Un immense cortège funèbre, pensa Louise, devenu l’accablant miroir de nos peines et de nos défaites. »

Bien sûr, il est aussi question de secrets de famille, mais justement, je ne vais pas tout vous dévoiler…

Ce roman est un chant choral où, les événements aidant… ou pas, les destins de Raoul et Gabriel, deux appelés, de Désiré, l’usurpateur, de Fernand le garde mobile et de sa femme vont converger, juste avant que l’un d’entre eux ne disparaisse.

Le grand bonheur de ce livre tient à la fois au croisement du style de l’auteur, on se régale toujours, et de ces histoires singulières qui se joignent au flux de la grande. Au détour, on plonge dans la vie dans le fort du Mayenberg, on assiste au sabotage du pont de Tréguière, on éborgne la propagande du ministère de l’information. En effet, « en temps de guerre, une information juste est moins importante qu’une information réconfortante. Le vrai n’est pas notre sujet. Nous avons une mission plus haute, plus ambitieuse. Nous, nous avons en charge le moral des Français ». Autant de morceaux de bravoure qui vous tiennent en haleine.

Entre drame et comédie, une fois le nez dans les premiers mots, vous aurez du mal à ne pas enchainer les pages.

« Que se passa-t-il dans l’esprit de Gabriel, c’est assez difficile à dire. Il n’avait pas l’âme héroïque, mais il avait des scrupules. Il était là pour faire quelque chose et il ne l’avait pas fait. Sans mesurer le risque, il courut vers le pont et s’installa derrière le fusil-mitrailleur ».

Et comme Pierre Lemaitre aime chacun de ses personnages, qu’il les cocoone, c’est assez rare, ou qu’il les maltraite, qu’ils soient anges, c’est rare, ou malfrats, ça arrive parfois, on se prend de sympathie pour chacun d’eux et on lui sait gré, une fois l’histoire terminée, comme pour les précédents tomes, de nous donner de leurs nouvelles.

Si vous n’avez pas lu les précédents, aucun souci, vous les lirez… après.

Fiche technique du livre
Auteur : Pierre Lemaitre
Editeur : Albin Michel, 2020
Nb de pages : 540 pages
Genre : Roman

Photo tête d’article : Peter H de Pixabay

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