Expo/Des ors et des couleurs, la collection Alana

Pour la première fois au monde, la collection Alana s’expose au musée. Alvaro Saieh, un homme d’affaire chilien et son épouse Ana Guzmàn, leurs deux prénoms en acronymes ont donné son nom à cet ensemble, sont un couple de collectionneurs passionnés par les œuvres des primitifs italiens et de la première renaissance. Ils ont rassemblé des tableaux de grands maîtres, tel Fra Angelico, le Tintoret, Vasari, Véronèse, pour ne donner que quelques noms, et de petits peintres moins connus. Ils ont formé un ensemble représentatif de l’art de cette époque et de son évolution, tant dans la représentation des motifs que dans la technique utilisée. A partir de ces œuvres essentiellement religieuses qui transmettent la foi de l’Eglise à une époque où les « fidèles ne savent ni lire ni écrire », l’ambition d’Alvaro Saieh est aussi que la collection « prenne sens dans la culture d’aujourd’hui ».

Accrochage, première salle d’exposition – Collection Alana Musée Jacquemart André – Photo : ©fC

La première salle évoque l’accrochage des tableaux tel qu’il se découvre dans l’appartement new-yorkais du couple. C’est certainement la plus belle salle de l’exposition parce qu’elle montre des tableaux qui se répondent, vivants en quelque sorte : aux couleurs chatoyantes se mêlent les ors, les formes des tableaux, rondes, rectangulaires, les triptyques, les époques et les siècles se mélangent avec les peintres. C’est un enchantement des yeux. Comment ne pas admirer cette Vierge d’humilité du XVe siècle peinte en médaillon par Jacopo del Sellaio ? On y trouve « la variété stylistique des différentes écoles picturales italiennes, (…) un même goût pour la finesse d’exécution et le traitement virtuose des formes et des couleurs » qui préside au « développement de la collection ».

Vierge de l’humilité avec l’Enfant Jésus, Saint Jean-Baptiste et deux anges de Jacopo Del Sellaio – Vers 1490 – Photo : ©fC

La suite de l’exposition est plus « classique » et suit un ordre chronologique.

Faisons un peu d’histoire… Deux ans avant sa mort en 1224, Saint François d’Assise reçoit les stigmates ; dans sa chair s’inscrivent les cinq plaies du Christ. Cette brutale incursion de Dieu dans l’histoire d’un homme va bousculer la représentation de la religion. La peinture quitte peu à peu les règles iconographiques, très codifiées qui figurent le Christ, la Vierge, les saints dans des postures très hiératiques, pour arriver à une incarnation et une proximité extrêmement touchante du sujet religieux dans l’émergence du sentiment humain. C’est toute cette évolution, quittant Byzance « au profit d’un art plus latin », que suit la collection Alana.

Carlo Dolci (Florence, 1616 – 1686). Détail Sainte Agathe, 1664-1665. Huile sur toile marouflée sur bois.
Photo : ©fC

D’un point de vue technique, « jusqu’au milieu du XVe siècle, le liant de prédilection est constitué d’un mélange d’eau et d’œuf (jaune ou blanc). C’est la peinture ‘à la détrempe’, brillante certes mais aussi opaque », qui fera place à une peinture à l’huile sur toile plutôt que sur bois, comme pour les retables par exemple. Le liant à l’huile qui se développe largement à partir des années 1430, permet de « superposer des nombreuses couches translucides ». Il donne de « mieux représenter les accidents de la lumières, comme les reflets ou les ombres portées », offrant une peinture « lumineuse et transparente ». La peinture sur toile ne prendra son essor qu’à la fin du XVe siècle quand la mobilité des œuvres devient indispensable avec le développement d’un marché de l’art. C’est aussi à cette époque que sont définies les règles de la perspective et qu’advient peu à peu un art profane. Dans Les Vies, Giorlgio Vasari définit la manière moderne comme étant « une règle excellente (…), une juste mesure, un dessin parfait et une grâce divine, et de plus une grande abondance de sujets et une profonde connaissance de l’art ». Tout un programme…

Vous retrouverez la collection Alana au musée Jaquemart André jusqu’au 20 janvier 2020. Avis aux amateurs… cette exposition recèle un condensé de splendeurs.

Sainte Trinité avec la vierge et quatre anges, Nicolodo Di Pietro Gerni – Vers 1380-1385 – Tempera sur bois – Photo : ©fC

Les citations sont extraites des cartouches de l’exposition ainsi que du Journal de l’expo.

Photo tête d’article : Détail L’ange de l’Anonciation d’Annibale Carracci, dit Annibal Carrache – vers 1582-1588 – Photo : ©fC.

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